Si vous êtes là c’est sûrement que vous avez lu ma chronique du premier CD. L’avis général de la presse et des fans est mitigé, certains trouvent l’album très bon, d’autres sont déçus, tout le monde s’accorde en revanche pour dire que The Documentary 2 est bien supérieur aux derniers projets de The Game.
Comme vous avez pu le lire, je fais plutôt partie des déçus ou plutôt de ceux qui ne trouvent pas ce premier CD du calibre de ses deux classiques : incohérent et inégal musicalement, trop long, trop de featurings, trop de samples cramés, trop de flows pompés, trop de namedrop, un milieu d’album faible et au final peu de très bonnes tracks… Ce premier album, sans être mauvais, ne m’a donc pas vraiment convaincu mais j’ai aussi entendu et lu un peu partout queThe Documentary 2.5 était au dessus, ce qui a aiguisé ma curiosité.
Une semaine à peine donc pour digérer ces 19 premières tracks et voilà donc déjà la 2èmefournée, toujours aussi bourrative : 18 nouvelles tracks pour une trentaine de featurings, pourtant le tout est beaucoup plus digeste.
L’intro nous explique enfin en détail l’origine du beef avec 50 Cent, une entrée en matière instructive pour les fans de l’époque Aftermath et cohérente pour un album qu’on nous vend comme la suite de The Documentary, dommage que ça ne débouche pas sur une grosse prod de Dre à la Westside Story, The Game m’aurait déjà mis dans sa poche !
D’ailleurs je repense à Westside Story et me dit que Game a oublié en route l’importance de la première track d’un skeud… C’est la première impression de l’auditeur et celle qui va plus ou moins conditionner son écoute. Que ce soit sur le premier CD ou sur celui-ci, les premières tracks ne sont ni très bonnes, ni très mauvaises et n’ont musicalement pas du tout l’énergie que devrait avoir une intro…
Ce n’est pas le seul problème de sequencing de l’album, Gang Related par exemple nous emmène dans une ambiance 40 Shebib ou fin de Forest Hills Drive et casse un peu la dynamique du début d’album, surtout que The Game ne se foule pas niveau rimes avec un enchaînement lassant de « my nigga » et de « blood ».
Pas de Dre donc pour kicker comme il faut l’album mais son poulain Anderson .Paak, omniprésent sur les premières tracks. Je suis fan de cet artiste et je pense qu’il était vraiment le point fort de Compton, malheureusement je ne retrouve pas la magie d’Animals lors de ses interventions sur l’album de The Game.
Ce premier morceau n’est pas au niveau de son titre, malgré un bon sample vocal et une vibe d’ensemble plutôt plaisante on se demande tout de même ce que fait ce Magnus Carlsen en début d’album…
Crenshaw/80s And Cocaine aurait été une bien meilleure entrée en matière, on embarque direct dans le low rider de The Game, en plein ride vers LAX, les cuivres et le flow énergique du blood font monter la pression, comme sur To Pimp A Butterfly ou Compton, beaucoup de switch beats très réussis et de transitions toujours soignées.
Un warm-up avant un des bangers de l’album, vous avez certainement déjà entendu la bombeGang Bang Anyway, trois couplets très solides sur une instru bien sombre qui me fait penser à la deuxième partie du son Oxymoron. Des bruits de guns et des sirènes, on est en plein gang bang, les bloods et les crips sont représentés sur le même morceau, ScHoolboy Q côté crips est d’ailleurs très en forme avec un couplet aussi puissant qu’une rafale d’AK, on attend avec impatience son prochain album. Avec Jay Rock et Kendrick sur la première partie, TDEest donc clairement bien représenté.
En fait quasiment toute la nouvelle scène West Coast est sur l’album et malgré l’absence encore une fois préjudiciable du Doc à la prod, le blood sait jouer sur la corde sensible des vrais fans du son de Cali, la cohérence musicale qui manquait au premier opus se retrouve sur ce deuxième volet beaucoup plus ensoleillé.
C’est avec un grand smile que l’on retrouve DJ Easy Dick (Doggystyle) sur plusieurs skit, il introduit d’ailleurs le moment fort de l’album, l’enchaînement Quik’s Groove – Outside – Up on the Wall.
On se retourne en pleine époque G-Funk avec un groove irrésistible de DJ Quik, un des meilleurs morceaux de l’album, The Game utilise une nouvelle fois son flow caméléon pour se muer en Suga Free avec des bars qui m’ont bien fait rire :
« Treat my dick like a newborn, hold the head »
Je ne vais pas le blâmer, le mec a quasiment réussi à faire apparaître du soleil dans ma grisaille parisienne ! On ramène Snoop pour poser sur cette track au lieu de LA et on ressuscite Nate Dogg pour le refrain et c’est dans la boîte.
Si je suis moins fan du son de la Bay Area, j’ai été surpris par la prod de Travis Barker qui s’en inspire clairement pour une autre petite bombe West Coast avec un refrain entêtant deMvrcus Blvck. Les 2 featurings ne servent pas à grand chose mais on est content d’entendreE-40 même pour quelques bars, j’aime d’ailleurs assez quand des featurings célèbres sont utilisés pour servir le MC principal et non pour lui voler la vedette, Kanye le fait souvent sur ses albums et ça permet de garder une bonne cohérence d’ensemble.
On termine les vacances californiennes avec une virée dans les années 70 avec un Up On The Wall très P-Funk vintage produit par DJ Battlecat, un kiff qui arrive malheureusement un peu tard dans l’année… Le genre de son que j’aurai fait tourner tout l’été pour faire chier mes voisins !
Après un sex skit complètement inutile mais essentiel à tout album West Coast digne de ce nom on arrive au posse cut My Flag/Da Homies produit par the one and only DJ Mustard, celui qu’on aurait voulu à tout prix éviter… Bien qu’encore basé sur la même structure et les mêmes drums que toutes les prods de la moutarde, le beat est plutôt bon et moins commercial qu’à l’accoutumé, je trouve pourtant que dans le contexte de l’album, le morceau est en trop, une nouvelle incursion de la Bay Area pas vraiment nécessaire avec trop de featurings, perdant un peu l’auditeur. Un bon point tout de même pour Game qui met en avant les jeunes espoirs de la côte ouest.
On attendait également un morceau sur 2Pac et c’est la légende Scarface, très proche dePac, qui rejoint The Game sur Last Time You Seen pour parler une fois de plus du mystère qui entoure la mort de l’icône. Sans être mauvais, le morceau n’apporte pas grand-chose de nouveau, The Game soulève la théorie du complot accusant les policiers du LAPD et les illuminatis sans vraiment donner plus de détails ou de nouveaux faits. Le placement de la track juste après Gang Related n’est pas forcément très judicieux non plus et c’est le genre de son que l’on skippera après plusieurs écoutes.
Vous l’avez compris, ce 2ème CD ravira à coup sûr les fans du son West Coast et si c’est certainement l’album le plus ensoleillé de The Game, le blood reste toujours un MC très versatile et on attendait tous son featuring avec Nas, The Ghetto. On connaît l’alchimie entre les deux mais cette réunion au sommet, comme Don’t Trip, est encore produite par Will.i.am, mais pourquoi ?
La prod n’est pas mauvaise, elle est même plutôt bonne et pourrait être un leftover d’It Was Written mais pourquoi ne pas jouer la carte East jusqu’au bout et appeler un Premier, unLarge Pro, un Q-Tip ou un Pete Rock ?
Je suis dur, on ne passe pas loin du très bon morceau, The Game en mode conscient et deux coups de pinceau de Nasty Nas qui dépeint sa vision du ghetto dans divers endroits du monde.
Les lyrics et le beat sont en parfaite symbiose et sont la suite logique du morceau Gangbang Anyway qui mettait en avant les conséquences dramatiques des guerres de gangs.
Malheureusement on ne va pas se mentir, le refrain de Will.i.am est horrible et le tout est au final un peu attendu et pas très original.
C’est finalement le feat avec Lil’ Wayne qui nous surprend, sans aucun doute un des meilleurs morceaux de l’album avec Quik’s Groove. Beaucoup auraient voulu un couplet deWeezy en plus, pas moi, le mec enchaîne merde sur merde, pas besoin d’un couplet pourrave de plus en mode Young Thug. Il lâche un très bon refrain et ça me suffit !
Comme sur Start From Scratch et Doctor’s Advocate, The Game rappe complètement bourré et avec ses tripes. Il évoque avec beaucoup d’émotion son passé avant le rap et le destin tragique de pas mal de ses potes. Le beat des Cool & Dre est aussi puissant que les lyrics, notamment grâce à ces chœurs samplés qu’on entend acapella en introduction du morceau.
La fin de l’album est moins réussie, la track sponsorisé « Aftermath 2.0 » est mal produite et me conforte sur le fait que King Mez et Justus n’ont pas le niveau.
Comme sur le premier CD avec Just Another Day qui tentait de mimiquer le classique Where I’m From, on est déçu par la deuxième partie de Like Father Like Son. Tous les ingrédients sont pourtant là : les 2 fils de The Game lâchent quelques bars, uncle Busta Rhymes est sur le morceau, Alchemist le produit, mais non, la mayonnaise ne prend pas. L’instru est beaucoup moins réussie que sur le premier Like Father Like Son et le refrain de Bustasemble forcé.
La conclusion Life est bien plus réussie, le sample soulful interpolant Whitney Houston nous rappelle d’ailleurs l’excellent Why You Hate The Game ?. Un dernier tour de piste qui permet au blood de retracer tout le chemin parcouru et tous les obstacles franchis pour arriver à ce moment précis de sa carrière :
« I made fucked up decisions but don’t let ’em crucify me
I’m still the same nigga on my California ID
Yeah, Compton nigga
Blame Dre, it’s his fault that I’m a monster, nigga
I was selling crack in west side Bompton, nigga
Yeah I can rap, but I ain’t ask for no sponsors, nigga
I was light skin and young Klay Thompson, nigga
15, had guns like Contra, nigga
Now they call me bipolar, big contradiction
This The Documentary 2 without Doc’s prescription
Motherfucker »
Passons rapidement sur la bonus track El Chapo… certains trouvent que c’est un gros banger, moi je trouve la prod horrible, dans les deux cas le son n’a pas du tout sa place sur cet album mais bon, vu le buzz qu’elle a eu, on comprend que Game l’ai mise en bonus.
Vous l’aurez compris, tout n’est pas parfait, malgré des skits et des transitions très travaillés le sequencing est douteux, l’album démarre avec des chansons qui devraient le terminer et se termine avec une track qui n’a rien à foutre là. Certains morceaux sont ratés ou sont des fillers, rien de catastrophique mais encore une fois s’il avait réduit à 13-14 tracks on aurait clairement gagné en qualité.
Au final ce Documentary 2.5 est beaucoup plus cohérent, réfléchi, personnel et profond que la première partie, il fera à coup sûr plaisir aux fans du son West Coast des années 90 et cette fois-ci je peux clairement dire que c’est son meilleur album depuis Doctor’s Advocate.
Il manque certainement quelques « classic tracks » pour que l’album passe un pallier, le tout est plutôt très bon mais pas transcendant non plus, en réduisant le nombre de tracks et en ajoutant The Documentary 2, Don’t Trip et Summertime, The Documentary aurait pu avoir un séquel très solide.
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